HOKKAIDO : LA PETITE SIBERIE JAPONAISE
24 mars 2023Pour mon grand retour au Japon, mon choix s’est porté sur l’île septentrionale, donc tout au nord du japon. EIle reste encore peu connue du tourisme, et son climat est beaucoup plus froid que le reste de l’Archipel.
En effet, en hiver, il y règne un froid intense, et il y a de la neige en pagaille, en raison de vents portants provenant de Sibérie. Au moment où j’y étais, en février, les lacs et une partie de la mer gèlent. Mais c'est aussi à cette période que l'on peut faire les plus belles rencontres.
L'ILE D'HOKKAÏDO : HOKU : Nord, KAI : Mer et DO : Chemin = Le chemin de la mer du nord.
Ici, nous sommes sur les terres d’origines des Aïnous, ancien peuple aborigène de chasseurs et pêcheurs. Ici on croit aux divinités incarnées par les animaux de la forêt ou de la terre. Cours d’eau, faune et flore sont pour les aïnous autant de Dieux subvenant aux besoins des hommes.
L’objectif principal était d’observer et de photographier la nature et les animaux en plein hiver : j’ai été largement récompensé, grâce à sa beauté naturelle et à sa nature préservée.
Il y avait bien longtemps que je n’avais connu une pareille neige, et il nous a fallu parfois retrousser les manches pour se sortir de situations compliquées, malgré notre Nissan 4X4, indispensable sur ses routes verglacées et enneigées.
C’est au sein du parc National de Kushiro que se trouve le petit village de Tsurui : au milieu des champs se trouve le lieu de nourriture de cet oiseau hautement symbolique : les grues au Parc de Tsurumidai.
Apercevoir une grue, c'est 1000 ans de bonheur, car quiconque plie 1000 grues en papier verra son voeu exaucé !
Orizuru, c'est ce que l'on appelle la grue en origami, la fameuse technique du pliage du papier, et je dois bien avouer que je n'ai pas encore essayé !
Très présente dans les mythes et légendes, et facilement reconnaissable avec leur tête couronnée d’une pointe de couleur rouge, qui rappelle le drapeau Japonais, elle est un pur symbole de longévité et d’immortalité. (Tancho #丹頂)
Riche en symbolisme, elle représente avant toute chose la vie éternelle. Un couple de "tancho" est uni pour la vie. C’est pour cette raison que les robes de mariée sont parfois ornées de cet oiseau.
Les grues, très populaires au Japon, ont été nommées « Monuments Naturels Spéciaux » et donc érigées au rang de Trésor national ! Pour les préserver, un sanctuaire a été créé, et font l’objet d’un nourrissage en hiver : sans cette aide précieuse, elles disparaitraient tout simplement !
D’ailleurs, cet oiseau est si majestueux que Nicolas BOUVIER a écrit dans ses chroniques Japonaises :
« On peut voir dans le marais une grue lisser son plastron, un oiseau d'une élégance et d'une blancheur indicible posée au milieu de roseaux comme un vase Ming « C’est beau, non ?
C’est dire son importance, mais pas seulement. Avec leur plumage élégant blanc & noir, cette tâche rouge sur la tête, et leurs gracieux ébats, elles ont la grâce céleste de danseuses de ballet !
Leur joyeuse danse enjouée fait partie de la parade nuptiale. C’est pour cette raison qu’elles attirent beaucoup de photographes, nombreux à braver le froid en cette saison.
Pour vous donner une idée de ses dimensions, ce plus grand oiseau du Japon mesure 1,5 mètre de haut, avec une envergure de 2,4 mètres.
"Parade la grue
Un hiver en noir et blanc
Doux ballet de plumes"
Haïku, Didier Larive 3/2023
Du côté du Pont Otawa, en venant tôt le matin, le spectacle est magnifique lorsque les grues viennent profiter de l’eau chaude qui forme des vapeurs brumeuses sur la rivière Setsuri, le tout sur fond de lumière rosée. La vue du pont est spectaculaire si le phénomène se produit.
Attention, il y a beaucoup de monde, donc venir très très tôt ! En gros, il faut être vers 5h00 du matin sur place !
C’est au sein du Parc National d’Akan, sur le lac Kussharo, que l’on peut observer les cygnes chanteurs. Ils viennent ici car la présence de sources chaudes, « L’eau des Dieux » liées à une forte activité volcanique, leur permet de se mouvoir dans une eau libre et non gelée.
Et si le cœur vous en dit, vous pouvez creuser votre propre onsen et tester le « Sunayu » pour vous mettre à l’eau ! Je n’ai pas essayé !
Cet oiseau au bec jaune et sa pointe noire est caractéristique de la région. C’est très drôle de les voir ainsi sur la glace, souvent en boule pour dormir, ou même atterrir et décoller de manière gracieuse ou pas !
Leur présence dans l’eau chaude vaporeuse, leur blancheur immaculée d’où émerge leur bec jaune, procure de jolies images. De beaux moments !
Cette partie d’Hokkaïdo est atypique, puisque constituée d’une très longue bande de sable de près de 26 kms !
Ici, c’est le règne de la nature sauvage et protégée, le royaume des cerfs Sika & du renard roux de Sakhalin
Curieusement, l’approche des renards roux et des cerfs sika n’est pas très compliquée : il en a partout, surtout les cerfs, et ne sont pas si farouches.
Il existe une possibilité pour photographier le grand hibou nocturne piscivore en affût : Le Kétoupa de Blakiston, espèce asiatique nocturne, dont il ne resterait que quelques individus à Hokkaido.
Le long d’un petit ruisseau, c’est le seul spot où se trouve un affût : une sorte de baraquement constituée de vitres que l’on peut ouvrir, et permettant de le photographier assez facilement. Un vieux minibus inconfortable aménagé à l’extérieur permet aussi des prises de vue ; une fois la nuit venue, des spots sont allumés, et la propriétaire des lieux y dépose du poisson. Bon, c’est comme çà, et l’oiseau est habitué.
S’il veut bien se montre évidemment ! Car il va falloir s’armer de patience, et ne pas avoir peur de faire des nuits blanches. En effet, il peut arriver à n’importe quelle heure, comme en témoignage le livre des observations rempli par chaque visiteur. A réserver en avance, et venir de bonne heure pour avoir la possibilité de choisir sa place. Bon point : une machine à café est à disposition !
Il faut se rendre à L’auberge Wahi no Yado ( Hokkaido, Menashi District, Rausu, Kyoeicho, 6)
Direction le lac Furen, près de la ville de Nemuro pour photographier plusieurs espèces d’oiseaux, dont des milans noirs, pygargues de Steller et pygargues à queue blanches. Dans ce lieux, les rapaces sont attirés avec du poisson déposé sur la glace. Seul solution afin de bien les observer, même si cela peut paraitre peu naturel.
A l’est, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, le parc du même nom signifie « le bout du monde ».
La particularité du lieu réside dans le fait que la mer gèle sur de grandes surfaces, et se transforme en paradis givré de blocs de glace à la dérive. C’est le cas également de son port, Abashiri pris sous des plaques de glace.
Ce phénomène s’appelle le Ryuhyô. Ces plaques proviennent du fleuve Amour en Sibérie, frontière entre la Russie et la Chine. Par le biais des courants et des vents, ces grandes étendues blanches de mer glacée dérivent, et arrivent en mer d’Okhotsk. Bien sûr, la quantité de glace n’est pas toujours identique, et c’est pourquoi il convient de s’informer auprès de la météo locale.
Et à partir du port, en janvier, février, on peut embarquer sur un bateau pour des sorties sur la mer d’Okhotsk. Là, le spectacle est superbe, et permet d’observer Pygargues à queue blanche et de Steller.
Bien que non situé sur Hokkaïdo, mais dans une vallée paisible au nord de Nagano se trouve le Jigokudani Yaen Koen, un des habitats des singes macaques japonais. On peut ainsi les observer de près se baigner et se réchauffer dans un onsen, une source volcanique d’eau chaude.
Et lorsque la neige fait son apparition, leur pelage couvert d’une pellicule de glace avec leur bouille empourprée fait son effet ! Il est vrai que ces macaques ainsi présentés sont un sujet idéal pour les photographier !
Bien que nourris, ces singes des neiges sont en totale liberté. Ils vivent un hiver rude, mais justement, la présence humaine leur permet de supporter ce passage difficile. Ce qui est très étonnant en les observant, c’est leur expression proche de l’être humain.
Contrairement aux idées reçues, les bains dans l’eau fumante ne sont pas une solution pour eux pour se protéger du froid, puisqu’ils sont bien nourris. Non, ils ont juste copié les humains se baignant dans un onsen voisin devenant cette habitude !
Il est très facile de les approcher, certains même se faufilant entre les visiteurs. Le site est intéressant pour les photographier, même si l’ensemble du site n’est pas très joli.
Dans le même secteur, j’ai eu la chance d’apercevoir un caprin asiatique, assez rare à apercevoir, appelé KAMOSHIKA, (ou JAPANESE Serow) blotti derrière un arbre, et se délectant d’herbes à travers la neige. Revêtu de son pelage d’hiver, c’est un bel animal.
Pour terminer cet article sur une note du printemps naissant, j’ai assisté à la floraison des pruniers, célébration appelée « Ume » au japon, avant celle des célèbres cerisiers en fleurs "Sakura".